lundi 15 décembre 2014

Grace de Monaco

Commentaire

Grace de Monaco

Scénaristes

Arash Amel

Commentaire

Un biopic succinct et au dénouement un peu léger.

1) Points forts
L'idée de rassembler les élites du début des années 60 dans une oeuvre un peu mélancolique offre du glamour et répond à la vocation manifeste d'une principauté.
Le rappel des enjeux géopolitiques de l'époque aide également à contextualiser le récit, et à mesurer l'importance de la posture incarnée par la princesse Grace Kelly, ici Nicole Kidman. Par exemple, cela se révèle lorsque le prince Rainier III affirme avoir échoué et qu'il doit abandonner son pays à de Gaulle, qui réclame l'impôt en contre partie de la protection et de l'approvisionnement en ressources du pays monégasque. On comprend alors bien le dilemme pour Grace de devoir choisir entre sa carrière d'actrice et celle, plus diplomatique, d'une princesse.

2) Points faibles
Les deux grands défauts de ce scénario sont que : l'enjeu de la princesse n'apparaît pas insurmontable et que le dénouement, en outre, semble improbable.
D'abord, sur l'enjeu. L'objectif de la princesse est de se réaliser en tant qu'actrice. Que se passerait-il si elle n'y retournait pas ? Quel est l'enjeu lié à cet objectif ? Elle serait certainement très déçue, mais après ? On peine donc à admettre qu'une autre situation est possible que de ne pas y retourner. Pas d'élément captif, donc, pas d'enjeu. Le véritable enjeu est celui de son conjoint, le prince. C'est lui qui a beaucoup à perdre puisqu'il en va de son trône et de laisser ou non le pays entre les mains du général de Gaulle. Jusqu'au milieu du film, on a même l'impression qu'on s'est trompé de personnage principal. Celui qui vit le plus d'épreuves apparaît être le prince, et non l'actrice.
Ensuite, comment peut-on réellement croire qu'un discours mièvre lors d'un gala pour la Croix rouge ait pu résoudre tous les maux géopolitiques européens des années 60 ? Grace nous fait un discours assez simpliste au demeurant généreux sur l'idée qu'être bon, c'est bien, et que faire des guerres, c'est pas idéal. Soit. Et tout le monde s'en émeut au point que de Gaulle, présent et charrié par ses congénères, en aurait annulé l'invasion de Monaco tout comme Napoléon ou Louis XIV n'ont, eux non plus, pu s'opposer au sens d'une grande histoire monégasque jonchée de croupiers et de fortunes défiscalisées. On peine à croire que de tels dirigeants plutôt va-t-en-guerre puissent si aisément se laisser vaincre par l'émotion, surtout au service d'une cause factuellement assez douteuse. Le dénouement qui repose sur cet événement semble donc un peu léger. A croire que, soit le récit est incomplet, soit il a été édulcoré pour tenter de servir un propos qui n'a pas réellement existé, ou que le maintien du trône de Rainier III relèverait plus de manoeuvres obscures que de réelles implications sociales. Bref, on reste sur sa faim.

3) Le même scénario, réécrit
Sans enlever du glamour qui caractérise le côté un peu féérique de Monaco, ses paillettes, il aurait au moins fallu nourrir davantage l'enjeu de l'héroïne et son dénouement pour ne pas paraître creux. Par exemple, une petite tirade saignante de Hitchcock à Grace, comme on les aime, jouant sur le peu d'années qu'il lui resterait pour séduire le monde, pour lui faire changer d'avis, aurait été bienvenue. Nous aurions mieux ressenti la pression intérieure que Grace aurait eu à devoir renouer avec son public pour s'accomplir au travers du rôle de sa vie qu'elle n'aurait pas encore eue. Et puis, impliquer des intermédiaires géopoliticiens, avec des enjeux obscurs, auraient aidé à mieux admettre la causalité entre le discours final de Grace au monde, et l'issue géopolitique des diverses crises de l'époque. Même si elle-même n'avait pas d'implication directe, l'effet domino nous aurait aidé à apprécier son pouvoir et ce en quoi c'était bien là que se déroulait, probablement, le véritable rôle de sa vie.

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